Quelles sont les nouvelles tendances de mobilité qui se dessinent à l’heure de la sobriété énergétique et de la rigueur inflationniste après avoir été bousculées par la pandémie et les effets de la pérennisation du télétravail ?
Quelles sont les nouvelles tendances de mobilité qui se dessinent à l'heure de la sobriété énergétique et de la rigueur inflationniste ? Après avoir été bousculés par la pandémie et les effets de la pérennisation du télétravail, comment nos clients voyageurs intègrent - ils ces nouvelles donnes ? Quel impact ont-elles sur leurs comportements de mobilité et choix modaux aujourd'hui et demain ? Quels sont les leviers à même de faire revenir les absents ? De garder à bord les voyageurs présents, fidèles d'hier comme les nouveaux, et d'augmenter leur usage des transports ? Comment éviter de passer des « absents d'un jour » au statut « d'abandonnistes pour toujours ? ».
Avec cette 8ème vague réalisée fin 2022, c’est une version « augmentée » du baromètre Transdev MV2 que nous vous livrons. Si l’objectif était à l’origine de suivre uniquement les effets de la pandémie, il est nécessaire aujourd’hui de souligner les facteurs qui ont et pourraient changer le comportement des usagers.
Si l’on constate quotidiennement que la Covid-19 a durablement modifié le paysage des mobilités, dans quelle mesure la question sanitaire mise en avant par cette épidémie, même si elle n’est plus d’une actualité brûlante, a-t-elle généré des changements de comportements pérennes ?
Brochure du 8ème Baromètre des Mobilités Transdev / MV2
Télécharger la brochure du 8ème Baromètre des Mobilités1er constat : une vision qui se stabilise et qui présente fin 2022 une photo globalement équivalente à celle du printemps de la même année et plus largement depuis 1 an
si l’on observe dans les réseaux une fréquentation qui augmente progressivement depuis la sortie de la pandémie, la part des utilisateurs des transports en commun d’avant Covid encore présente dans les réseaux quant à elle diminue au fur et à mesure des enquêtes. Cela peut paraître contre-intuitif, mais cette baisse des anciens usagers est compensée par une hausse de nouveaux utilisateurs. Nouveau lieu de résidence, nouveau travail, transition de vie, la clientèle se renouvelle et ses usages aussi..
Concrètement, entre le printemps et l’automne 2022, les usagers d’avant-COVID ayant abandonné depuis les transports en commun ont progressé de 3 points en 6 mois, et de 4 points en un an, en lien avec ces changements de vie, et les nouveaux utilisateurs ont augmenté de 2 points sur la même période*.
A noter : la proximité des résultats des réseaux entre l’Ile de France, les grands urbains et villes moyennes.
2ème constat : En termes de profils, la part des usagers fidèles qui ont conservé le même niveau d'usage avant et après le Covid est stable depuis 1 an
Les intentions de reprise sont en baisse passant de 5% fin 2021 à 1% fin 2022, et sont à relier aux changements de comportements avérés depuis.
Quant aux indécis, s’ils sont en légère hausse (+4 points en 1 an), on verra que leur indécision est désormais moins liée à la Covid stricto sensu qu’au choix du mode collectif offert par les transports.
Comparant ensuite l’Impact déclaré de la crise sanitaire sur les habitudes de déplacement à la réalité des comportements, on constate une vraie et profonde intégration des changements de mobilité qui sont ainsi choisis.
En effet quand on leur pose la question directement, la crise sanitaire est déclarée cause de leurs changements d’habitudes de déplacements pour plus d’un nouvel utilisateur des TC sur 2 (55%) et un tiers des « abandonnistes ».
Qu'est ce qui ne change pas et peut être considéré un « acquis » structurel de la mobilité post Covid ?
- On observe toujours que la fréquence d’utilisation des transports en commun est un déterminant important des changements. Plus la fréquence d’usage est importante, plus le retour à bord des transports collectifs l’est aussi. Les utilisateurs réguliers, plus captifs de nature, sont en effet davantage revenus que les occasionnels, tendance observée depuis le début du baromètre, mais moins marquée aujourd’hui.
- Nous pensions pouvoir mettre en évidence des changements de jours d’utilisation des transports en commun dans la semaine, or les quelques changements se compensent. Seuls 6% des clients ont changé leurs jours de déplacements dans la semaine, 3% ont augmenté leur usage (semaine ET week-end) et 3% l’ont réduit (semaine OU week-end) avec pour conséquence un solde net négligeable.
Ces mêmes résultats peuvent être observés au sein d’une même journée entre les heures de pointe et les heures creuses.
A noter : c’est au Pays-Bas que ce type de changement avait été observé avec une baisse significative aux heures de pointe. Nous n’avons en France pas du tout la même typologie.
- Il n’y a pas non plus de changement d’usage massif sur la nature des titres de transport achetés. Seuls 8 % des clients présents avant la pandémie et aujourd’hui ont changé de catégorie de titre de transport : 3 % ont basculé de l’abonnement vers un titre occasionnel tandis que 2 % ont fait le cheminement inverse avec un solde net presque nul aussi. Les autres transferts concernent le passage de l’abonnement annuel à l’abonnement mensuel, ou du ticket unitaire au carnet, ou vice-versa.
Quels sont les facteurs qui ont déjà et pourraient changer les comportements de mobilité ?
En termes de profil socio-démographique, ceux qui sont le moins revenus sont les séniors, les occasionnels et les télétravailleurs.
Dans la cible des actifs, ceux qui ont en effet la possibilité de télétravailler sont beaucoup moins revenus (même s’ils représentent une faible part dans l’échantillon).
A noter : 21% des actifs en France pratiquent le télétravail, et 46% en Ile-de-France soit 2,5 millions de franciliens qui restent chez eux pour travailler au moins deux jours par semaine.
Pourquoi les clients fidèles ont-ils augmenté leur usage ? Pourquoi de nouveaux clients sont-ils apparus ? Quelle part de nos clients ont dû revoir leurs habitudes de mobilité en raison de l'inflation et du coût du carburant ?
Ceux qui ont augmenté leur niveau d’usage (1% des utilisateurs fin 2022) citent généralement un seul motif de changement là où les nouveaux utilisateurs (5% des utilisateurs) en citent 2 ou 3.
L’augmentation de l’offre de transport en commun, citée à 14%, est le premier facteur de hausse des usages actuels des utilisateurs fidèles, suivi de la baisse du télétravail et du souhait d’éviter les embouteillages (tous deux cités à 12%).
A noter aussi le prix du carburant qui a poussé 10% d’entre eux à augmenter leur niveau d’usage.
Les nouveaux utilisateurs ont changé leurs habitudes en raison des contraintes qui pèsent sur la voiture et pour des raisons économiques : le prix du carburant (34%) est le 1er facteur invoqué. Ce n’était pas forcément le cas en mai 2022 lors de la vague précédente. Les embouteillages arrivent second (30%). L’augmentation de l’offre de transport étant le 3ème facteur de changement invoqué TC (28%).
La « pénalisation de la voiture » et la pénibilité à l’utiliser qui en découle (par rapport au confort et la liberté qui en font des attributs déterminants) sont donc des facteurs structurant du changement.
L'impératif écologique et environnemental est une thématique pour laquelle le biais de désirabilité sociale est bien présent, mais quelle est sa réalité dans les comportements ?
La « conscience écologique » pèse encore peu, (avec un niveau d’impact encore faible sur la hausse des usages), mais progresse.
A la question de tout opérateur de savoir « quelle peut-être est l’appétence pour la valorisation des impacts CO2 de nos activités et dans les choix modaux ? En quoi la prise de conscience écologique de nos activités peut-elle jouer en faveur du choix des TC ? », notre baromètre qui mesure la « conscience écologique » dans les motifs de hausse des usages à travers l’item « L’urgence climatique /diminuer empreinte carbone/utiliser transports moins polluants) montre une progression de 8 points en 6 mois (9% en vague 8 déc. 2022- vs 1% seulement qui citaient cet argument en vague 7 – mai 2022, qu’ils s’agisse d’usagers fréquents ou occasionnels).
« Absents d'un jour ou pour toujours » ? Pourquoi les clients d'avant Covid ont-ils quitté les TC ou réduit leur usage ?
Pour les abandonnistes l’usage de la voiture en est la raison principale : 3 abandons sur 4 sont liés à la voiture. Et parmi eux 3 sur 4 sont liés à l’acquisition d’un véhicule.
La crainte du Covid reste aussi ancrée et d’actualité pour eux (à hauteur de 15%), notamment chez les séniors. La réassurance tant sanitaire qu’en termes de sureté, et sa visibilité auprès de ces publics, doit donc être maintenue et renforcée.
Dans cet esprit de se tenir à l’écart des Transports en commun, le recours aux courses de proximité est également présent pour 15%. Cela rejoint la crainte des Transports en commun en termes de sentiment de sûreté, exprimée par 8% (item « La sécurité dans les transports ou aux arrêts s’est dégradée »).
Si la marche à pied et le vélo sont minoritaires comparés aux autres facteurs, ces 2 modes pèsent néanmoins respectivement 16% et 12% dans leurs motifs d’abandon.
Pour ceux qui ont simplement réduit leur niveau d’usage la baisse est en revanche très peu liée à la voiture. Les Transports en commun sont « concurrencés » par la voiture à même hauteur que la marche à pied et le vélo (autour de 10% chacun).
A noter : le lien du report sur la marche avec les courses de proximité est également démontré par l’observatoire des tendances qui enregistre une hausse de fréquentation des magasins de proximité malgré des prix élevés.
On constate une baisse de la mobilité des Français, qui, grâce au télétravail partiel (29 % de la population active), consomment plus près de chez eux. Avec des chiffres d’affaires en croissance de 45 % depuis 2019, les petits supermarchés et les commerces de bouche traditionnels (bouchers et primeurs de quartier) reconquièrent le cœur des consommateurs et représentent désormais 13 % des ventes alimentaires, contre 10 % en 2019.
Télétravail et essence chère dissuadent donc de nombreux déplacements et encouragent les courses au plus près du domicile même si les commerces de proximité sont plus chers de 18 % en moyenne.
Et demain, quelles sont les perspectives ? Qu'est-ce qui peut changer avec quels leviers ?
Les facteurs qui pourraient inciter à l’avenir les clients actuels à davantage utiliser les TC, ou les anciens clients disparus à les reprendre :
- D’abord les niveaux tarifaires, cités en premier pour les clients actuels et devant la quantité d’offre (pour 45% des usagers – fidèles et nouveaux – la fréquence et temps d’attente sont des freins à l’utilisation des TC). A noter : Ce sont principalement les jeunes actifs qui citent les tarifs. Cela s’explique par un pouvoir d’achat en moyenne inférieur aux autres catégories d’âge. Les raisons économiques (l’inflation/c’est moins cher de prendre les Transports en commun) sont aussi invoquées par 31% comme motif de hausse des usages.
- Les critères liés à la voiture arrivent en 2nde position : prix du carburant et embouteillages sont bien présents (entre 20% et 24% pour le 1er et 22% à 27% pour les seconds). Les ZFE (Zones à Faibles Emissions) pourraient aussi les inciter à augmenter leur usage des Transports en commun comme les restrictions de stationnement (15% évoquant ces deux motifs).
- Pour les clients abandonnistes, les critères liés à la voiture sont moins cités. Ils sont plus sensibles au renforcement de la sûreté (20%) et au risque de contamination : 20% citent le port du masque comme incitation à reprise les transports. Globalement il y a moins d’arguments cités pour faire revenir des usagers perdus que pour augmenter le niveau d’usage des voyageurs encore présents.
- Enfin la « conscience écologique » (« A cause de l’urgence climatique /diminuer empreinte carbone/utiliser transports moins polluants ») jouerait pour 16% en faveur de la reprise ou de la hausse des usages.
* non-utilisateur des Transports en Commun avant covid qui le sont aujourd’hui, nouvel indicateur depuis mai 2022 – vague 7