Interview

Investissements publics

La mobilité quotidienne doit être une priorité

  • Laurent Mazille

    Laurent Mazille

    Directeur des Affaires Publiques du Groupe Transdev

04 Février 2025

Comment le paysage politique de l’UE a-t-il changé depuis les élections du Parlement européen et comment pensez-vous que ce changement affectera les progrès vers une mobilité plus durable ?

Les partis populistes qui ont rejeté le Pacte Vert sont sortis renforcés des élections européennes. Cela montre à quel point la cohésion sociale et territoriale a été négligée dans la mise en oeuvre du Pacte Vert. Le risque est que le changement climatique s’accélère et ait un impact encore plus important sur le pouvoir d’achat des Européens, voire sur leur qualité de vie. Le prix de l’inaction dans ce domaine est élevé. L’UE ne peut espérer progresser uniquement sur la base de changements technologiques et de nouvelles réglementations. Le Fonds social pour le climat et le Fonds de cohésion de l’UE doivent être orientés vers des alternatives durables telles que les transports publics afin de concilier les objectifs environnementaux à moyen terme - 55 % d’émissions en moins d’ici 2030 - et la préservation du pouvoir d’achat des Européens à court terme.

Certains affirment que le Pacte Vert de l’UE devrait être mis en attente. Êtes-vous d’accord ?

Le Pacte Vert doit garder son objectif de décarbonation mais, si l’on veut éviter qu’il ne soit complètement rejeté, il a besoin de mécanismes budgétaires qui prennent en compte la nécessaire adaptation des territoires et des populations. La cohésion sociale est au cœur de la mobilité.
Depuis 2020, Transdev appelle à une révision de la stratégie européenne de mobilité pour l’orienter vers la mobilité quotidienne qui a le coût le plus élevé pour les consommateurs européens et génère le plus d’inégalités.

Quelles solutions de transport public peuvent être mises en oeuvre rapidement et à un coût supportable ?

L’urbanisation croissante crée des besoins de mobilité que, souvent, seule la voiture individuelle peut satisfaire rapidement. Il est donc nécessaire de concentrer les investissements et les services supplémentaires sur les zones périurbaines et rurales afin de limiter la part de la voiture dans les transports. Des solutions existent déjà, comme les bus express qui circulent sur des voies autoroutières réservées, permettant un accès rapide aux sites d’emploi, tout en étant une charge financière moindre pour les passagers.

Quel message souhaiteriez-vous adresser aux nouveaux membres du Parlement européen en matière de mobilité durable ?

L’Europe est confrontée à des défis économiques en termes de concurrence avec la Chine et les Etats-Unis, à des défis environnementaux en termes d’adaptation des entreprises et des territoires au changement climatique, et à des défis sociaux avec les difficultés rencontrées par les ménages à faibles revenus. Ces défis peuvent avoir un impact sur nos choix démocratiques, comme nous l’avons vu lors des récentes élections européennes. Nous devons choisir avec soin nos priorités pour le prochain budget-cadre de l’UE. Nous avons déjà obtenu une révision du réseau transeuropéen de transport (RTE-T) intégrant les périphéries des centres urbains. Le Parlement européen doit maintenant mettre en œuvre cette révision. La mobilité quotidienne, avec son impact sur notre pouvoir d’achat et sur notre empreinte carbone, doit être une priorité de cette législature.