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Cohésion Sociale

Comment rendre la transition écologique de la mobilité équitable et inclusive ?

12 Décembre 2024

L’action climatique nécessite des investissements importants, des changements de mode de vie et parfois de nouveaux comportements. Tout cela peut peser sur une partie de la population qui dispose d’une faible marge de manoeuvre financière pour effectuer les changements requis par la transition verte. La question de savoir si la transition climatique et l’inclusion sociale sont véritablement incompatibles se pose de plus en plus, notamment depuis les manifestations à travers l’Europe contre des mesures comme la taxe carbone et les réductions d’émissions.

La voie vers l’acceptation

Les changements nécessaires à cette transition serait plus facilement acceptés s’ils étaient expliqués, équitables et offraient une protection économique aux populations les plus vulnérables. « Les gens doivent sentir que la transition est juste, qu’ils en font partie et qu’elle est abordable », a déclaré Daniel Mes, membre du cabinet du Commissaire européen chargé de l’Action pour le climat.

Colin Scicluna, chef de cabinet de la vice-présidente de la Commission européenne chargée de la Démocratie et de la Démographie, a quant à lui ajouté que s’il n’y a « aucun doute sur la nécessité de rendre notre continent plus vert, nous devons également réfléchir aux coûts et aux implications qui y sont liés, afin de nous assurer que la transition est juste pour tout le monde. »

Au-delà des contraintes financières objectives, on peut également avoir le sentiment que les élites politiques européennes qui poussent à la transition ont une compréhension limitée des réalités sur le terrain, a suggéré Ulrike Guerot, politologue et fondatrice de l’European Democracy Lab..

Une transition inclusive

« Il semble que tout tourne autour des villes, des villes intelligentes, et fondamentalement des élites de ce monde qui sont toutes végétaliennes désormais. Plus de viande, plus de voitures, ils roulent à vélo et se félicitent d’être « climatiquement neutres », mais ce n’est pas le cas de la majorité des gens. »

Jillian Van der Gaag, conseillère en politiques publiques pour la Ville d’Amsterdam, recommande de s’attaquer résolument à ces stéréotypes si l’on veut que la transition vers une mobilité durable bénéficie d’un large soutien. « Il est important d’écouter et de voir ce dont les gens ont besoin, en particulier ceux qui n’ont pas les moyens de changer », a-t-elle déclaré.

Selon Philippe Van Parijs, philosophe et économiste belge très impliqué dans les initiatives non gouvernementales locales, un dialogue honnête permettra d’ouvrir la voie à une large acceptation du changement. « Les politiques deviennent applicables parce que les gens comprennent ce qui se passe, même s’ils ne sont pas tout à fait d’accord » a t-il déclaré. « Surtout s’ils ont le sentiment d’avoir été consultés et qu’au moins certaines de leurs préoccupations ont été prises en compte. »

Pauvreté des transports

Pour Elisabeth Kotthaus, chef d’unité à la direction générale de la Mobilité et des Transports de la Commission européenne, chargée des aspects sociaux, des droits des passagers et de l’égalité des chances, « la pauvreté des transports » est un sujet clé à aborder. « L’UE se concentre actuellement sur la définition des critères de mobilité « abordable, disponible et accessible », a-t-elle déclaré.

La pédagogie est nécessaire, selon Sébastien Bailleul, directeur des relations institutionnelles et européennes de Wimoov, une association française engagée pour une mobilité inclusive. « Nous travaillons avec des demandeurs d’emploi, des allocataires sociaux, des jeunes de banlieue, des personnes qui n’ont pas de solutions », a-t-il précisé. « Nous partons de leur réalité. Lorsque nous soutenons les gens, nous parlons des questions écologiques. En les amenant à utiliser les transports publics et d’autres alternatives à la voiture, nous leur permettons de réaliser 31 % d’économies d’énergie et d’argent, car les déplacements en voiture coûtent cher. »

Selon Mme Kotthaus, d’autres avantages de la transition doivent être mis en évidence. « Ce qui manque parfois, c’est une communication positive sur les avantages. »

« L’acceptabilité est essentielle. Sinon, nous aurons des manifestations et des protestations parce que les gens ne comprennent pas la politique mise en place. » Barbara Stoll, directrice de la Clean Cities Campaign, a déclaré au Mobility Times « Nous devons prendre soin des personnes les plus vulnérables et les plus exposées de notre société, qui sont souvent celles qui supportent le plus gros du poids de la transition. »