Trop de français sont contraints à l’immobilité géographique !
La structure sociale et géographique de notre pays a été bouleversée depuis une vingtaine d’années et se retrouve marquée par une nette concentration des richesses, des emplois privés et de l’attractivité au sein des métropoles. Et ce phénomène tend à s’accélérer, la croissance dans les métropoles étant nettement supérieure à celle des territoires ruraux et périurbains. Le déficit de mobilité n’est qu’une des conséquences, parmi d’autres, de la fracture territoriale.
Dans ces territoires, les populations n’ayant pas accès à la voiture individuelle sont assignées à résidence. Les autres dépensent, en moyenne, trois fois plus pour leurs déplacements que les habitants des métropoles. Pourtant, le niveau de vie et le taux d’emploi y sont plus faibles. Les conséquences d’un déficit de mobilité sont multiples et impactent très fortement l’accès à l’emploi, à la formation professionnelle et universitaire, aux services publics et privés les plus essentiels et, plus simplement, à toutes les formes de sociabilité.
La réalité des inégalités entre les territoires est confirmée par les indicateurs économiques. Entre 2007 et 2017, 62 départements ont enregistré une destruction nette de 350 000 emplois salariés privés. A l’inverse, 30 autres ont connu une création nette de 620 000 emplois. Parmi eux, 12 départements qui correspondent aux métropoles engrangent 85% des créations d’emplois.
Un sentiment de déclassement est ainsi ressenti et génère des crispations évidentes, dont les conséquences se sont exprimées ces derniers mois.
86% des Français estiment que les difficultés d’accès à la mobilité constituent un frein à l’emploi et 19% ont déjà refusé un entretien d’embauche, faute de moyen de s’y rendre.
Répondre à la fracture territoriale en réintégrant la mobilité au cœur des territoires ruraux et périurbains
Une récente étude publiée par l’Autorité de la Qualité de Service dans les Transports (AQST) indiquait qu’en comparaison avec l’Allemagne, la qualité de la desserte des transports en commun au sein des territoires ruraux était nettement en retrait avec des fréquences inférieures de 3 à 5 fois et une offre bien inférieure dans le domaine des liaisons ferroviaires locales (les trains du quotidien).
L’ouverture à la concurrence du secteur ferroviaire en France devrait permettre aux opérateurs alternatifs, dont Transdev, de contribuer, en partenariat avec les régions, à redynamiser les petites lignes régionales.
Au sein des territoires ruraux et périurbains, où les faibles densités interdisent le déploiement d’une ligne de bus, des solutions alternatives de mobilité partagées peuvent aussi être mises en œuvre et compléter l’existant. Là où la voiture reste incontournable, nous devons encourager les usages partagés, en développant des offres de covoiturage, autopartage ou encore autostop au plus près des territoires.
Plus encore, les offres de mobilité doivent être rendues plus lisibles et intuitives, par la mise en œuvre de solutions intermodales certes, mais également par ce que nous appelons, chez Transdev, la Mobility As A Service : une expérience unifiée de la mobilité qui intégre l’ensemble des modes de transport d’un trajet dans une seule et même application, sans les opposer. C’est déjà le cas de l’agglomération de Mulhouse avec le Compte Mobilité ou bientôt de la Métropole de Saint-Etienne, avec Moovizy 2.
En ce sens, nous sommes à l’écoute des collectivités que nous nous attachons à accompagner dans la mise en œuvre de leurs services de mobilité.
Nous sommes en effet convaincus que la justice sociale est avant tout une justice territoriale.
Les opérateurs de transport publics doivent travailler en coopération avec les collectivités, à l’échelle des bassins de vie, et faire de la mobilité un véritable outil de dynamisation économique.
La LOM, en généralisant le déploiement des autorités organisatrices sur l’ensemble des territoires, poursuit une démarche salutaire de décentralisation.
Endiguer la fracture territoriale, c’est aussi accompagner la transition vers des territoires plus durables, en proposant des alternatives viables à la voiture individuelle et en engageant une transformation profonde de notre flotte de véhicules vers des modes de propulsion propres et moins coûteux, en premier lieu l’électricité et à terme l’hydrogène.
En effet, nous restons persuadés qu’un territoire plus attractif est pleinement engagé dans la transition énergétique.
La réponse à la fracture territoriale repose aussi sur des transports publics efficaces, disponibles partout, pour tous et sur l’ensemble des territoires.
Une coopération étroite entre les acteurs publics et privés avec l’implication de l’ensemble des acteurs engagés dans l’aménagement des territoires sera l’une des clefs du succès.
Thierry Mallet, Président-directeur général du Groupe Transdev