Ces signaux positifs invitent l’ensemble des opérateurs à poursuivre les efforts pour se positionner, auprès des Régions, comme des acteurs engagés dans la dynamisation des lignes régionales.
Décloisonner, structurer les territoires et favoriser une offre multimodale
Les petites lignes ferroviaires représentent, pour les voyageurs, les trains du quotidien. Elles constituent surtout un maillage essentiel de notre patrimoine ferroviaire national et représentent 42 % du linéaire des lignes. Surtout, elles sont une solution de mobilité de tous les jours favorisant l’accès à l’emploi, à la formation universitaire et professionnelle et aux services publics et administratifs les plus essentiels. En un mot : il est indispensable d’adopter résolument des approches volontaristes pour développer ces lignes, génératrices d’emploi local et nécessaires pour le développement économique.
Pour les collectivités, elles constituent en outre un vecteur central de décloisonnement des territoires les moins bien desservis. Le ferroviaire régional permet de connecter les périphéries aux agglomérations et offre aux voyageurs une desserte fine des territoires. En Allemagne, nous transportons depuis 1995, 4 000 personnes par jour sur la ligne Schorndorf – Rudersberg-Obendorf. Pleinement intégrée au réseau principal, ses horaires sont coordonnés avec ceux du S-Bahn reliant Schorndorf à Stuttgart, capitale du Bade-Wurtemberg. Sur cette ligne, les taux de satisfaction-voyageurs sont d’ailleurs, selon la Verkerhsverbund Rhein Rhur, bien plus élevés que sur la moyenne régionale.
Le ferroviaire contribue ainsi à structurer les territoires autour de gares ou de nœuds d’échange favorisant la multimodalité et l’interconnexion aux autres modes de transport. Et bientôt, les solutions de Mobility As A Service favorisées par l’adoption de la loi d’orientation des mobilités vont mettre ces lignes ferroviaires au cœur de la multimodalité et du report modal. A Mulhouse Alsace Agglomération en 2021, elles viendront s’ajouter au Compte Mobilité lancé en 2018 qui comprendra alors les transports en commun, les parkings, les vélos, l’autopartage, le stationnement sur voirie, les taxis et les bornes de recharge électrique.
Favoriser les alternatives à l’autosolisme et renforcer la fréquentation des trains
En 2019, la FNAUT indiquait ainsi qu’en cas de transfert temporaire ou définitif d’une ligne ferroviaire sur autocar, entre 25 % et 51 % de la clientèle ferroviaire retourne à la voiture. En revanche, dans le cas inverse d’une réouverture de ligne, 65 % des voyageurs préfèrent le rail.
Partout en Europe, l’ouverture à la concurrence du rail s’est accompagnée d’une hausse de l’attractivité du secteur ferroviaire. Une enquête de l’Autorité de régulation des activités ferroviaires et routières (ARAFER), publiée en mars 2018, révélait ainsi que, depuis l’ouverture à la concurrence du marché, la fréquentation s’est accrue de 80 % en Suède entre 1988 et 2013 et de 29 % en Allemagne. En Grande-Bretagne, la fréquentation a plus que doublé sur la période 1994 – 2015, soit une hausse annuelle moyenne d’environ 6 %.
En Rhénanie, nous opérons depuis 1999 la ligne reliant Kaarst, Düsseldorf et Mettman, abandonnée par la Deutsche Bahn. Depuis la reprise de la ligne, la fréquentation a augmenté de 4 500 %, pour un total de 23 000 personnes transportées chaque jour, contre 500 personnes en 1999.
D’un point de vue environnemental, le ferroviaire est un facteur de transition vers des modes de transport plus soutenables pour les générations futures. La FNAUT indiquait ainsi que le bilan énergétique et environnemental d’un transfert sur route est, la plupart du temps, négatif dès que le train est rempli d’uniquement une douzaine de voyageurs.
Garantir la soutenabilité économique des lignes régionales
Ces indicateurs nous invitent à considérer la nécessité de préserver les lignes régionales. Il n’y a pas de fatalité dans ce domaine ! Certes, la question de la soutenabilité économique de ces petites lignes reste centrale. En Allemagne, hors péage, un train/km coûte environ 10 euros à exploiter, contre 18 euros en France.
Mais les solutions existent, au cas par cas, adaptées à chaque territoire. La concurrence devrait permettre d’abaisser le coût du transport pour les collectivités en capitalisant sur plusieurs leviers, notamment sur une organisation différente du travail et la poly-compétence des personnels travaillant sur ces lignes.
L’ouverture à la concurrence n’est pas une finalité. Elle est, avant tout, un outil qui doit permettre aux opérateurs alternatifs, comme à l’acteur historique, de s’attacher à développer l’innovation et de proposer, à moindre coût, un service toujours plus avantageux. L’intérêt des voyageurs et des collectivités demeure, pour l’ensemble des acteurs, la principale motivation. Une motivation bientôt dopée par l’ouverture à la concurrence des trains régionaux.
– Thierry Mallet, Président-Directeur-Général du groupe Transdev